[OSM-talk-fr] Retour des limites de communes en bord de mer

Philippe Verdy verdy_p at wanadoo.fr
Mer 5 Déc 11:16:31 UTC 2012


Effectivement. Les limties des eaux territoriales sont définies en fonction
de la distance à une « ligne de base » qui suit de très près la ligne de
côte, mais avec d'une part une limite très fliue pour cette ligne de base,
et d'autre part des ajustements de la distance revendiquée en fonction des
accords avec les pays voisins.

Si on avait la ligne de base exacte, ou pourrait alors en déduire le
prolongement des limites communales en mer par simple calcul purement
géométrique.

Mais un autre facteur entre en jeu : les communes ne sont pas libres de
faire ce qu'elles veulent sur le littoral, qui est de la compétence de
l'Etat (en témoigne les lois de protection du littoral).

Les données de la ligne de base légale sont pourtant essentielles pour
définir, du côté terrestre ce qui constitue le "littoral" protégé par la
loi.

On se rend compte de la présence de cette ligne de base uniquement après
des accidents (les tempêtes par exemple ou les séismes, qui soulèvent des
lames d'eau au delà du seul effet permanent des marées prévisibles, ou des
courants marins qui eux sont plus difficiles à prévoir car dépendant aussi
d'autres facteurs, climatologiques notamment, éventuellement aussi soumis
au régime des fleuves dépendant cette fois d'évènements météorologiques à
moins long terme mais aussi de l'utilisation et des contraintes qui sont
faites des eaux fluviales, avec un effet sur la hauteur d'eau apportée dans
les estuaires).

On n'a aucune donnée pour l'instant sur la ligne de base, celle-ci étant
sujète à diverses interprétations et modifications en fonction de certains
évènements, sans conséquence pourtant sur les eaux territoriales — sauf si
cela a pour effet de faire émerger ou disparaître un ilôt : l'élévation des
niveaux des océans avec le climat pourrait bien avoir des conséquences avec
des réductions notables des eaux territoriales dans certaines zones où
elles ont été créées autour de tous petits îlots (voire juste des bancs de
sable) à peine émergés, notamment dans l'Océan indien et dans les atolls du
Pacifique soumis à une érosion et un effondrement rapide, accéléré en plus
par la mortalité des récifs coralliens à cause de l'acidification de l'eau,
ou encore par un changement du régime des courants marins par des apports
massifs d'eau douce changeant la salinité de l'eau et sa température.

On peut toujours essayer d'interpréter les lois, mais elles se contredisent
entre elles, ou sont presque inapplicables faute de données de référence
légale assez précise (la ligne de base en est un excellent exemple). Si un
problème juridique survient, les tribunaux iront vers un partage des
responsabilités entre les collectivités locales concernées (et aussi de
l'Etat pour le domaine public maritime et le domaine littoral protégé) et
non vers des responsabilités exclusives de l'une ou de l'autre de ces
collectivités.

Et en fin de compte c'est l'Etat qui réglera la note, ce qui rend
finalement les limites intercommunales ou entre les autres collectivités
locales dans le domaine maritime inexistantes en pratique ! Puisque ces
communes voisinent le même domaine maritime de l'Etat, elles sont toutes
concernées de façon solidaire, et sont incapables de décider quoi que ce
soit par elles-même, seul l'Etat en fin de compte intervient (par les
préfets chargés des régions maritimes françaises, qui ne sont pas de la
compétence des régions administratives)

Je pense qu'en France il n'est pas possible de définir des limites
territoriales en mer des communes, départements, régions administratives,
ou de n'importe lequel de leur découpage ou regroupement). Seules les
régions maritimes seraient pertinentes.

Les exceptions à la règle de l'exclusivité des régions maritimes sont les
collectivités territoriales situées hors du territoire métropolitain
continental, car il est alors possible d'attacher à la collectivité
territoriale de Corse, ou aux ROM, COM et à la Nouvelle-Calédonie, un
domaine maritime régional déterminé par  les eaux territoriales françaises,
sans pour autant pouvoir le découper davantage entre les deux départements
de Corse, ou entre les autres collectivités et communes plus petites).

Mais si on étend ensuite à la ZEE française, la région maritime de Corse et
les régions maritimes métropolitaines continentales en Méditerranée ne sont
plus séparables non plus : c'est la même ZEE, avec des tonnes de conflits
d'intérêts entre les pays voisins (par exemple pour les droits de pêche).
Et seules alors les ROM, les COM et la Nouvelle-Calédonie pourraient alors
avoir un intérêt dessus (avec toutefois des difficultés de partages de
compétence concernant la ROM de Guadeloupe et les deux COM de Saint-Martin
et Saint-Barthélemy si c'est la même ZEE française; de même entre la ROM de
Mayotte d'une part et d'autre part la COM des TAAF au sujet de l''extension
de la ZEE autour de certaines îles du Canal du Mozambique, une ZEE
contestée par les pays voisins, comme partout en fait dans chacun des
districts des TAAF).

On en reparlera seulement le jour où on aura des données fiables sur la
prétendue « ligne de base » légale française, permettant alors de définir
précisément le partage du domaine maritime entre les collectivités locales,
et aussi de découper finement le domaine terrestre littoral.

Pour l'instant on fait "au mieux" pour seulement **approcher** la ligne de
base grâce à la ligne de côte (en coupant dans les estuaires à l'endroit où
on il y a soit un barrage soir un pont, ou bien, s'il n'y a pas de tel
ouvrage en coupant on fait remonter la ligne de côte jusque là où le fleuve
dans son lit maximum n'a qu'une largeur voisine de 50 mètres ou moins, ou
quand on a des données fiables permettant d'affirmer que la partie basse du
fleuve est sensible à la marée mais pas la partie haute, ce qui permet
alors de définir une partie maritime du fleuve, et une partie "terrestre"
pouvant entrer dans le champ des collectivités locales).

Noter aussi que la séparation des communes sur les fleuves et rivières est
également assez floue : tant qu'on a des bornes terrestres, c'est précis,
sinon la limite est partagée arbitrairement au milieu du lit maximum (et
cette limite pourra varier si le cours d'eau modifie naturellement son
cours (à moins que les collectivités locales se mettent d'accord,
éventuellement devant la justice, pour garder ce qui était auparavant à sec
et pas dans le nouveau lit déplacé).

Des données ouvertes pourraient pourtant aider : le cadastre n'est pas
suffisant pour ça ! Mais les données des zones inondables pour la
prévention des risques et les interdictions de construction (privées ou
publiques) peuvent servir.

On a un problème similaire pour les délimitations de communes en montagne
(sur les parties en altitude, souvent placées dans des réserves régionales)
: on admet qu'on suit les lignes de crête, meˆme s'il n'y a aucun marquage
: cela concerne de toute façon des secteurs protégés où les appropriations
privées sont interdites et où les collectivités ne peuvent pas non plus
décider toutes seules (pour cela les structures de collaboration des parcs
régionaux ou nationaux sont beaucoup plus adaptées, et en ce sens, ces
parcs devraient être considérés comme des collectivités territoriales
distinctes des autres collectivités locales qui y adhèrent pour régler tous
leurs litiges ou se concerter pour les aménagements voulus par l'une ou
l'autre).

Un problème similaire survient avec les zones militaires (possession
directes de l'Etat) : les collectivités locales n'ont presque rien à
décider elles-mêmes, l'Etat agit alors comme s'il était sa propre
collectivité locale. Il doit alors exister une structure de collaboration
pour régler les litiges administratifs. De fait les limites communales
(voire départementales ou régionales) sont en fait assez indicatives et
sans effet hors des accords spécifiques entre l'Etat et les collectivités
(les limites administratives traversant les zones militaires n'ont alors
qu'une trace historique, qui ne sera utile que si l'Etat décide un jour d'y
cesser son activité exclusive, en concédant alors ces terrains aux communes
se portant candidates pour les gérer, il peut arriver que même aucune
commune, ni aucun département ou région n'en veule mais que ces terrains
tombent alors dans le panier d'un parc national ou régional auquel adhère
les autres collectivités locales). C''est l'Etat qui décide tout seul par
exemple quelle sera la collectivité locale qui pourra revendiquer des taxes
locales pour les résidents (individuels ou entreprises) autorisés dans ces
zones militaires (mais l'Etat peut fixer sa propre taxe locale lui-même,
pour en partager ensuite une partie aux autres collectivités comme partie
intégrante des dotations aux collectivités locales, avec un contrat
Etat-collectivité).

Tout le problème des limites administratives est qu'on confond trop souvent
la notion géographique (y compris toponymique) avec l'autonomie relative
d'organisations morales comme les collectivités locales : même si
géographiquement elles "semblent" avoir un territoire bien défini, ce
territoire est un gruyère à trous, où elles n'ont pas toute leur compétence.

On doit distinguer la compétence de l'Etat (dont les préfectures, l'armée
et les institutions nationales comme la Présidence, le Parlement, le
Gouvernement, le Conseil constitutionnel) et celle des collectivités
locales car il n'y a que l'Etat qui n'a pas de trou dans sa couverture
territoriale (l'Etat ne découpe pas d'ailleurs le territoire national, sauf
en Nouvelle-Calédonie dans son statut transitoire actuel complexe où deux
collectivités locales se partagent le pratiquement même territoire selon
deux droits distincts relevant du gouvernement et du Congrès de
Nouvelle-Calédonie : en ce sens, on pourrait croire que la France est
redevenu une fédération, comme au temps de l'Union française avant la
création des DOM et la citoyenneté française unique, mais ce n'est pas le
cas car le territoire de droit commun n'est pas divisé de celui de la
France, même s'il coexiste avec le droit coutumier : tous les citoyens
néo-calédoniens sont citoyens français, et tout le territoire
néo-calédonien coutumier est aussi partie intégrante du territoire de la
république, même si le droit commun ne s'y applique pas automatiquement à
tout ceux qui y vivent).

Globalement, on a cartographié dans OSM le découpage assez informel de
l'Etat, mais pas les territoires de compétence des collectivités locales,
au moins jusqu'à l'échelle des arrondissements (préfets et sous-préfets en
métropole et dans les DOM/ROM, ou hauts-commissaires de la république dans
les COM et en Nouvelle-Calédonie). Quand on arrive au niveau communal,
l'Etat n'est plus là  : les communes ne couvrent pas 100% du territoire
national. Les conseils généraux, régionaux ou territoriaux ne sont alors
que des regroupement de ces communes mais eux non plus ne couvrent pas 100%
du territoire de la compétence de l'Etat.

Les communes, départements et régions, les DOM et COM ou la Nouvelle
Calédonie ne recouvrent pas, **en tant que** collectivités territoriales,
les 100% du territoire national et sont toutes des gruyères tant qu'on n'a
pas ajouté le domaine exclusif de l'Etat (qui n'est pas de la compétences
des autres collectivités locales, mais est dans les attributions des
préfets et sous-préfets, qui gèrent aussi au nom de l'Etat les régions
maritimes, le domaine terrestre littoral, les parcs nationaux, et les
régions militaires, qui sont tous d'autres découpages informels de l'Etat
mais qui ne sont PAS des collectivités territoriales puisqu'ils ne
disposent pas de l'autonomie financière et réglementaire).



Le 5 décembre 2012 10:39, Damouns <damouns at gmail.com> a écrit :

> Bonjour à tous
>
> Je ressors un sujet qui avait suscité des débats en août 2010 à propos
> de la limite du territoire communal en bord de mer :
> http://lists.openstreetmap.org/pipermail/talk-fr/2010-August/025493.html
>
> La décision avait été prise ultérieurement (je ne retrouve pas où)
> d'inclure l'objet "coastline" (censé représenter la laisse de plus
> haute mer) dans le contour communal, pour simplifier la saisie : un
> des avantages que j'y vois après coup est aussi de retrouver un aspect
> des contours communaux similaire à ce dont on a "l'habitude". Les
> communes littorales françaises aujourd'hui dans OSM ne recouvrent donc
> pas du tout la mer.
>
> Je reparle de ça simplement parce que je suis tombé sur un document de
> l'ADEME, datant de 2002 mais qui n'avait pas été cité dans le débat,
> qui refait le point sur ça : "Éoliennes en mer et maîtrise foncière :
> Éléments juridiques" [1]. Ce sont en particulier les pages 39 à 45 qui
> concernent la délimitation du territoire communal. En gros, la théorie
> est que le territoire des communes doit bien s'étendre jusqu'à la
> limite des eaux territoriales, mais que les délimitations latérales
> (entre communes) ne sont pour l'instant nulle part définies.
> L'intégration à OSM devra attendre.
>
> [1]
> http://www2.ademe.fr/servlet/getDoc?cid=96&m=3&id=22487&p1=4366&p2=&ref=17597
>
> Bonne lecture
>
> _______________________________________________
> Talk-fr mailing list
> Talk-fr at openstreetmap.org
> http://lists.openstreetmap.org/listinfo/talk-fr
>
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