[Osmf-talk] OSMF 2020 entre inquiétude et déception

severin.menard severin.menard at protonmail.com
Thu Oct 22 15:39:20 UTC 2020


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Le dernier billet de blog [1] de Christoph Hormann (Imagico) sur l’OSMF a été mentionné dans le #531 de WeeklyOSM, mais n’a pas fait l’objet d’un fil de discussion sur la liste talk de l’OSMF. A deux mois de la fin de l’année et d’une nouvelle élection au board, il mérite pourtant d’être partagé et commenté.

Personnellement, je partage les mêmes inquiétude et déception, ainsi qu’un certain découragement. J’avais globalement la même perception, avec des nuances, quant aux différentes candidatures déposées lors de la dernière élection. Comment pouvait-on imaginer qu’un changement de 3 personnes sur un total de 7 produirait des mutations aussi radicales dans la conduite du board, ce que les manifestos des uns et des autres ne laissaient alors pas percevoir ?

L’instauration de réunions non publiques, qui n’avaient plus cours depuis 2016, est en effet regrettable et inattendue, alors que le seul candidat à vouloir leur retour au moment des élections n’a pas été élu, et qu’au même moment sortaient du board deux personnes qui auraient pu vouloir y mettre fin. Le respect de la transparence des échanges et décisions est un point qui ne devrait pas être galvaudé pour des avantages supposés en termes d’efficacité ou de facilité de parole. En dehors de la perte de capacité de contrôle des membres sur les décisions prises par le bureau de la Fondation, c’est également le meilleur moyen de démotiver celles et ceux qui désirent suivre, commenter et accompagner activement ses travaux. J’ajouterai pour ma part la tendance nouvelle à créer des comités restreints dont les membres sont choisis directement par le board (ou dont la sélection passe par les fourches caudines de l’un des membres du board), ce qui diffère notablement de la pratique des Groupes de travail ouverts à tout membre voulant s’y investir. Pourtant, même dans ce cadre de ces comités désignés, le board peut passer outre les décisions, pour preuve la sélection du comité restreint des Microgrants, dont certains candidats recalés ont finalement été retenus, ce qui n’a pas manqué d’étonner.

On touche ici à une autre tendance forte et inquiétante du board 2020 de l’OSMF : celle de s’affranchir des cadres construits par le passé, l’absence de volonté de mettre en place de nouveaux cadres argumentés et bien définis et le refus de réfléchir aux implications d’actions potentiellement lourdes de conséquences en termes de gouvernance ou de gestion financière. En l’absence d’historique visible dans le wiki (ce qui serait évidemment intéressant là encore en termes de transparence), difficile de dire quand exactement a été ajoutée la phrase : « Is responsible for allocating $$ to diverse worthwhile software projects with grants and microgrants. » dans la page Mission statement [2]. En dehors du fait qu’il soit assez curieux de faire mention de dollars états-uniens alors que, sauf erreur, les fonds de l’OSMF ne sont pas détenus dans cette monnaie mais en EUR et GBP, cette phrase apparaît particulièrement vague quant au périmètre de ces financements et laisse place à toutes les interprétations, alors que de nombreux échanges entre des membres de l’OSMF ont eu lieu sur la définition de différents périmètres, notamment autour d’un autre billet de blog publié également par Imagico [3]. Sauf erreur, un seul membre du board y intervient, mais l’échange est particulièrement éclairant : Rory McCann résume l’approche du board en matière de décision de financement à ce qui « sounds good » et il ne parvient pas à comprendre les attentes résumées par Imagico dans la phrase « document and publish the key parts of the decision making process, in particular risk analysis that has been made on social implications and economic risk ».

Dans un fil de discussion de la liste talk [4], Rory fait un parallèle entre ce mode de décision et le tagging OSM, comme s’il était possible de comparer des choix sémantiques flexibles, réversibles et sans conséquence aucune sur le futur du projet OSM avec des décisions, notamment financières, qui elles ne le sont pas.
Cette propension à (beaucoup) financer représente une autre tendance du board 2020 de l’OSM. C’est la plus spectaculaire et visible de l’extérieur. Un seul de ces financements relève du périmètre d’action de la Fondation : la fonction de Senior site reliability engineer pour assurer la continuité de service des serveurs OSM, qui fait partie des Mission statements de la Fondation, est difficilement contournable si les volontaires qui l’assuraient jusqu’ici ne souhaitent ou ne peuvent plus la maintenir et va représenter un poste de dépenses important dans le budget de la Fondation.

Par contre, le choix de financer en plus quatre logiciels de l’écosystème OSM fait désormais de facto de l’OSMF un acteur économique avec tous les enjeux et intérêts nouveaux que cela accompagne. Et en dehors de ces aspects cruciaux de gouvernance, ce choix explose d’autant plus le montant cumulé des dépenses de la Fondation au cours des 12 derniers mois. Celui-ci atteint environ 300 000 euros, dont 130 000 dévolus à une simple maintenance de iD, contre 75 000 pour l’année 2019, sur total de fonds disponibles qui s’élèverait à 613 000 euros [5]. La moitié des fonds disponibles aura donc été dépensée en une seule année, pratiquement l’équivalent de la donation du Pineapple Fund passé dans des projets logiciels en dehors du périmètre de l’OSMF. La pérennité de cette approche reposerait sur une stratégie de levée de fonds encore à définir totalement, alors que le contexte économique à venir est particulièrement morose, qu’il n’y a jamais eu jusqu’à présent qu’une seule donation à plus de 100 000 EUR et qu’il est possible que les SotM physiques, source de revenus pour la Fondation, ne puissent être organisés au cours des prochaines années.

En outre, cette action centrée uniquement vers des besoins techniques laisse totalement de côté d’autres enjeux pourtant majeurs, comme celui au cœur des deux dernières élections du board depuis l’épisode GlobalLogic : celui de sa fragilité à des tentatives de prise de contrôle. Deux ans après, l’OSMF ne semble pas être mieux armée pour contrer ce danger, et plutôt moins, ayant moins de trésorerie et des besoins financiers plus importants pour maintenir ses serveurs. Des ébauches de solutions avaient pourtant été proposées, mais n’ont pas été reprises et mises en œuvre, comme celle consistant à accroire le nombre de sièges au board pour réduire les risques d’un changement radical à la suite d’un simple renouvellement. Ce qui s’est précisément produit cette année… La recherche d’autres moyens pour renforcer la structure de l’OSMF pourrait par exemple nécessiter un appui juridique qui serait vraisemblablement coûteux :inventer ou consolider une forme juridique qui garantisse l’indépendance de la Fondation, le maintien de ses objectifs et de certaines de ses valeurs (par exemple une licence libre intégrant nécessairement attribution et Share Alike), à la manière dont les médias The Guardian ou Mediapart ont pu trouver des formes originales pour pérenniser leur indépendance.

[1] http://blog.imagico.de/osmf-general-meeting-and-board-elections/
[2] https://wiki.osmfoundation.org/wiki/Mission_Statement
[3] https://www.openstreetmap.org/user/imagico/diary/393808
[4] https://lists.openstreetmap.org/pipermail/osmf-talk/2020-August/007018.html
[5] https://lists.openstreetmap.org/pipermail/osmf-talk/2020-August/007003.html

Séverin
(publié également sur https://www.openstreetmap.org/user/SeverinGeo/diary/394528)
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